Souvenirs d'une bataille, bruits sourds des explosions, fracas des armes entrechoqués. Les lames perçaient la chair, les corps dansaient sous le feu des cannons. Au milieu de la géhenne un Croisé virevoltait. Une balle décrochée, sauter pour se replacer, dans l'euphorie des combats, il semblait enfin chez lui.
Soudain une déflagration, trop proche, l'oreille qui sonne, la vue qui se brouille. Alors que le monde se teintait de blanc, une cruelle froideur pénétra son flanc. Lance funeste, la face se figea à l'annonce de la mort, les yeux d'or tout pleins de panique confirmant le coup fatal. Une fin digne d'un bâtard, dans l'anonymat du sépulcre.

Sensation du sang qui s'écoule, fermer les yeux, le cœur s'endormant paisiblement. Qu'importait la défaite du corps, quand l'âme retournait au créateur ? Fraîcheur envahissant les sens, les mains qui, par réflexe, agrippèrent l'herbe environnante, alors que les paupières s'ouvrirent en sursaut. Un océan crémeux parsemé de coton, caresse du soleil, paradis sans doute, sauf que les échos du cœur se faisait entendre.
Lentement il se redresse, le regard passant du ciel à la plaine, confusion des sens, mais sérénité de l'esprit. Bouger un peu la main droite, la crosse froide d'un revolver chatouilla sa peau. Sourire, son arme ne l'aurait pas suivi dans l'autre monde, cela ne laissait qu'une solution.

Souvenirs d'une apparition. Une pièce ténébreuse, un lapin aux formes humaines. Nom oublié, mais il était venu à lui, l'avait transporté. Début du périple, invitation dans la…

« La tour intérieure… Murmura-t'il, le regard de nouveaux vers le ciel. Est-ce là votre souhait ma déesse ? »

L'intellect ayant rattrapé le corps, Ezéchiel se releva, ouvrant d'un geste sûr le chargeur de son arme. Parfait, tout était en place. Yeon malgré lui, il savait parfaitement où il se trouvait. Si l’enfer d’Evankhell méritait sa réputation, le reste promettait quelques divertissements.
Les responsables ne tardèrent pas à se faire entendre. Ton peu formel, bien différent des attentes de notre Croisé. Ils avaient été choisi pour suivre les pas du Divin, ce maringouin ne pouvait-il pas faire l'effort d'une présentation convenable ? Se gardant bien d'honorer cette stupidité, il se contenta de murmurer « Visible mode ». Merveille de technologie qui se matérialisa sous ses yeux. C'était donc cela une pocket…

Pas le temps de lambiner, car l'ordre venait d'être lancé. Bien entendu il fallait battre l'orge, tous ne méritaient pas de fouler le royaume de Zahard. Etirer les bras vers le haut, se dégourdir les jambes, et voici qu'il s'élança, une course vers un cri stupidement éructé non loin de lui.

« À l'époque de la moisson, je dirai aux moissonneurs. Scanda t'il soudainement, à l'approche de la sentence. Arrachez d'abord l'ivraie, et liez-la en gerbes pour la brûler, mais amassez le blé dans mon grenier. »

Détonation succédant à la prière, une balle transperçant un crâne, débris de métal ravageant le cerveau. Mort subite. Ses iris flamboyant d'autant plus dans l'ombre de sa capuche, lueurs portées sur un sourire naissant. Déjà une autre silhouette apparût. Pas sur le côté, doigt pressant la détente. Un deuxième projectile fusait vers une tête inconnue.

Se tenant au milieu d'une vaste pampa dorée, Shijin se trouvait un peu décontenancé par la quantité d'informations qui lui sautaient à la figure. En moins de temps qu'il n'en avait fallu pour dire "Visible mode", tout était parti en vrille et le son du métal qui s'entrechoque avait commencé à résonner de tous les côtés. L'instant de silence et d'appréciation de ce qui s'offrait à sa vue avait été bien court, et Shijin décida de le prolonger un peu. Pour graver quelque chose dans sa mémoire, la durée de l'évènement devait d'habitude se situer quelque part entre 3 et 30 secondes environ.

Il s'allongea sur le côté et ferma les yeux, inspira un grand coup l'air ravigorant de la Tour intérieure, et entreprit de retrouver tranquillement ses repères. Pour un peu, il aurait piqué une sieste. Mais déjà le bruissement des herbes l'alertait de l'arrivée imminente de quelqu'un à priori beaucoup moins détendu que lui. Allons bon. S'il laissait son approche être repérée sans que le moindre effort fut nécessaire, ça n'était probablement pas un type entraîné. Devoir se relever si vite à cause du premier ahuri venu l'agaçait. Son hésitation fut interrompue par la voix d'un homme qui vociférait quelque chose à propos de son grenier. Vu la quantité d'herbes couleur d'or dans le coin, c'était peut-être un fermier local un peu vindicatif. Ah, un coup de feu. Bruit d'un poids tombant au sol dans la direction du premier excité qui l'approchait. Bon, bah, voilà qui semble réglé. Il avait eu le nez fin en s'allongeant dans l'herbe, se dit-il à lui-même, content de lui. Deuxième coup de feu. Ca se rapprochait un peu trop tout de même.

L'appréciation du paysage s'étant révélée un projet éphémère, il décida de se relever. Il y aurait tout le temps de s'allonger quand le coin serait devenu moins bruyant. A une dizaine de mètres de lui se tenaient non pas un fermier sanguinaire, mais une silhouette encapuchonnée et un jeune freluquet blond. Il tenta une approche constructive : "Ohé, les deux, là ! Vous faites un peu trop de bruit, vous pourriez faire ça un peu plus loin ? Je veux bien vous filer un coup de main pour le grenier ou je ne sais pas quoi mais il faut vraiment arrêter de beugler comme ça !"

Venait il de manquer sa cible ? Des années d'entraînements soldés par une balle perdue. Ironie. D'autant plus que l'animal ne manquait pas d'assurance. Gringalet armé, il tenait sa lance avec aisance, et le sang dégoulinant de celle-ci trahissait quelques victimes. Il y avait donc un autre tigre dans l'arène ?
Troisième personnage faisant son entrée. Les iris enflammés se posèrent droit sur lui. Mâle trop confiant, habits sans formalité, l'individu aborda les deux combattants sans la moindre peur. Personne ne circulait ainsi sur un champs de bataille s'il ne pouvait se défendre. En temps normal Ezéchiel ne prendrait pas de risque, mais le goût de la chasse, l'ivresse du moment. Aujourd'hui plus que jamais il se sentait l'élu des Dieux. Pas de place pour la modération.

« Des brebis égarées… Scanda t'il, rechargeant son arme par la même occasion. Des brebis sacrifiées. Pour la gloire des Yeon. »

Joignant le geste à l'acte il pressa la détente. Deux détonations, un canon passant Frêle androgyne aux cheveux d'or à l'irrévérencieux mâle alpha. Il n'y avait rien de personnel dans cette exécution, il s'agissait tout simplement des règles du jeu non ?
Une alliance pouvait être envisagée, mais à quoi bon ? S'ils ne pouvaient survivre à ce simple assaut, leur exécution précoce relevait de l'acte charitable. Oui. D'une certaine façon Ezéchiel leur rendait service. Altruisme du Croisé, aucun remerciement nécessaire, juste le plaisir d'aider son prochain.

Résumé:

Le tireur à la capuche, manifestement assez tendu, accueillit son offre d'assistance désintéressée par une nouvelle exclamation qui restait dans le thème de l'agriculture. La mention du nom de Yeon fit lever un sourcil à Shijin, qui s'était fait de cette famille une image approchant plus d'une collection de beautés fatales que de fou furieux avec des têtes de bandits de grand chemin. La détonation de l'arme l'arracha à ses désillusions. Plaçant par réflexe ses avant-bras devant son visage et son torse, il les raidit en y concentrant du Shinsoo. L'impact fut encaissé par son bras gauche, accompagné d'une légère douleur. Un éclair de colère passa un bref instant dans le regard de Shijin, teintant ses lentilles colorées d'un éclat rougeoyant. Ca ne faisait pas cinq minutes qu'il était dans la Tour intérieure et sa manche était déjà trouée. Quelle vie.

"C'est comme ça qu'on dit bonjour, chez les Yeon ? T'es quoi exactement, leur garde-champêtre à la gâchette facile ?"

L'envie de lui montrer en retour comment les Ha disaient au revoir le gagna. A vrai dire, à peu près tous les cousins qu'il avait fréquentés auraient probablement tranché la question de façon expéditive. Mais il aimait à se croire doté d'une patience supérieure à celle qui était attendue des jeunes Ha, c'est-à-dire bien peu de chose. En déployant l'essentiel de la bonne foi dont il était capable de faire preuve, il devait bien admettre que les actions du tireur taciturne étaient cohérentes avec la situation. En ce qui concernait l'approche de Shijin, il suffisait d'attendre que les moins dégourdis se fassent régler leur compte et d'étaler les quelques téméraires qui insisteraient pour l'affronter. Après tout, un hématome équivalait chez les Ha à quelque chose entre le jeu turbulent d'enfants et une bise de bienvenue. Il décida que courir après chaque type aggressif au milieu de la pampa environnante serait une utilisation peu productive de son énergie. Il se monterait donc magnanime envers le fou furieux qui venait d'oser abîmer sa tenue.

Bien que Shijin fut déterminé à garder son calme, le nabot blond y alla de sa meilleure provocation en l'insultant avant d'oser suggérer que l'énergumène en face d'eux puisse représenter une menace suffisante pour qu'il s'allie au premier venu. Sur ces mots, le blondinet se mit à charger en ligne droite, du moins si un déplacement aussi lent pouvait être qualifié de tel. Shijin en eut presque envie de retourner à sa sieste tant l'approche était soporifique. Le lancier ne lui donnait pas l'impression de venir des 10 familles. Cela dit, la maneuvre ne manquait pas d'audace. Saluant la démarche, le Ha était curieux de la voir arriver à son terme, un peu à la manière d'un accident observé au ralenti.

"S'il reste quelque chose à quoi m'allier dans trente secondes, j'y réfléchirai !"

Se tenant prêt à réagir à une nouvelle salve de l'encapuchonné, Shijin se contenta de laisser l'initiative aux deux ploucs qui avaient l'air décidés à régler leurs différends de manière expéditive. Si le survivant persistait à vouloir se battre, il lui suffirait alors de lui en faire passer l'envie. L'audace du gringalet lui avait valu l'attention du Ha, mais s'il s'agissait bien d'un Yeon en face elle risquait de lui coûter cher.

Capacités utilisées:

Haussement de sourcil, vision inattendue, les agneaux échappaient au loup ? L'un usa d'habilité, tout à son honneur, ce genre de réflexes témoignaient d'un entraînement un tantinet sérieux. L'autre se contentait d'encaisser. Non seulement bouger ses bras à temps demandait une sacré vitesse, mais stopper une balle à main nue ? Voila qui était plus intrigant.
Ils avaient déjà aiguisé sa curiosité, la mention de sa déesse l'enflamma. Ils purent sans doute la voir, la flamme irradia ses iris dorés. Comique erreur toutefois qu'on pensait l'insulter, mais n'avait-il pas passé son temps à chasser les mauvais herbes ? Oui, en quelque sorte, l'inconnu avait vu juste.

« Un Garde champêtre hein. Reprit-il d'un ton calme et enjoué.Oui, en quelque sorte ! »

Ses lèvres s'étirèrent, sa gorge laissant s'échapper un rire discret. Ils ne pouvaient pas comprendre, mais quelle douce ironie. D'abord une renaissance, une purge, et maintenant de l'humour, quelle remarquable journée !

Reprise de l'action, le blondinet se prépara à agir. Demander de l'aide à  un inconnu, faiblesse ou prudence ? L'autre énergumène semblait partagé l'avis d'Ezéchiel sur le sujet, pourquoi chercher des alliés lorsqu'on pouvait avancer seul ?
Aucun effet de surprise, d'abord le lionceau rugît, maintenait venait la ruée. Courir sans protection alors qu'il se tenait dans sa ligne de mire… Grave erreur, à moins que cette lance ne fut pas juste ornementale. Très bien, il venait de tirer deux coups, il lui restait donc quatre balles. Premier tir, mordre le genoux droit, pour stopper la course. Deuxième détonation pour la clavicule gauche, briser le haut du corps. Troisième morceau de métal fila droit dans la hanche gauche. Dernier assaut, au niveau du torse, une balle au potentiel mortel si elle touchait son but.

Qu'il pérît et l'affaire s'arrêtait là, seulement il semblait tenace. Abaissant son arme encore fumante, le Croisé porta sa main gauche vers l'avant. Paume vers le sol, ses yeux brillèrent d'avantage, son sourire se perlant d'un rien d'un cruauté.

« Il en faut du courage, ou de la folie, pour courir vers un Yeon. »

Autrefois, jamais il n'eut osé usurpé ce nom, les maîtres des flammes lui ayant bien fait comprendre que s'il partageait leur sang, il n'était qu'un Bâtard. Seulement cela l'idiot ne le savait point, et d'ailleurs, une nouvelle vie signifiait de nouvelles règles.
L'avertissement lancé, son énergie afflua dans sa main. Energie flamboyante, d'étincelles à brasier, le membre s'enflamma. Manifestation d'un sang royal, barrière exubérante, mais pourquoi la peau du manieur rougissait à vue d'œil ? D'ailleurs même s'il ne perdit pas son sourire, le zélote se mordit brièvement les lèvres. Douleur masquée, rien qu'il ne pouvait supporter. La flamme par contre rugissait comme jamais, digne étendard des Yeons.

Résumé:

Renaissance

Tu hausses un sourcil face à la remarque du brun. Tu le trouves incroyablement calme pour un Régulier lambda qui vient de se faire attaquer par un membre des Dix Familles. Donc, soit il a une incroyable confiance en ses capacités, soit c'est un abruti fini, soit il n'est pas tout à fait "normal". Quoiqu'il en soit, tu t'en fous. Tu veux juste planter ta lance dans le corps du type qui a osé te tirer dessus. Approche relativement logique. Qui aime se prendre des balles ?

Tu essaies de rallier le crétin à ta cause -oui, tu as déjà fait ton choix d'option-. Mais, cela ne semble pas totalement fonctionner comme prévu, l'autre ne semblant pas véritablement avoir envie de tabasser le pistolero. Tant pis, tu charges tout seul. Au pire, tu te dis que si tu ne t'es pas fait le Yeon en trente secondes, alors l'autre viendra t'aider à lui faire son compte. Tu ne doutes pas trop de tes capacités et de ton expérience, mais on ne sait jamais. C'est un Yeon. Et qui dit Yeon, dit flammes. Et qui dit flammes, dit que tu as des chances de souffrir un peu -ou beaucoup-. C'est pas toujours facile d'être un slime.

Des balles fusent dans ta direction. Tu abandonnes ta lance et adopte ta forme de slime, plus petite et plus résistante, grâce à laquelle tu esquives in-extremis la plupart des balles de l'ennemi. Celle qui t'atteint t'arrache un cri de douleur. Ta voix est bien plus aiguë sous cette forme si bien qu'il ne reste aucune trace de virilité restante. Tu essaies d'atteindre le corps à corps, en dépit de ta forme qui n'est certainement pas des plus pratiques, mais ne récoltes que de vilaines brûlures qui t'arrachent un nouveau cri.


"C'est ça ! Cache-toi derrière tes flammes, espèce de trouillard !" lui hurles-tu, visiblement vexé bien que ce soit plus ou moins ta faute si tu te retrouves dans cette désagréable situation.

Tu effectues quelques bonds en arrières, tentant de faire abstraction de la douleur, pour camoufler ton petit corps dans les hautes herbes. Tu as mal. Tu as l'impression que le feu te consume de l'intérieur. Tu te frottes contre la terre et t'aplatis. C'est bon. Tu ne veux plus te battre avec le Yeon, plus pour l'instant. Tu souffres trop pour cela. Tu ne veux plus que te cacher dans un trou et attendre que le temps passe. Tu n'as pas envie d'échouer ici, au second étage, pour une question de fierté. Tu n'as pas non plus envie de mourir. Pas si tôt. Pas avant d'avoir atteint ton objectif, d'avoir mis fin à cette ère d'injustice et de souffrance.

Tu rampes. Tu essaies de t'éloigner de ton tortionnaire lentement mais surement...

KoalaVolant

Résumé:

 La Tour intérieure était décidément un endroit plein de surprises. Devant Shijin se déroulait une scène invraisemblable. Le blond sans peur et sans reproche venait de se liquéfier devant la salve du fou furieux, avant de zig-zaguer en bondissant vers lui sous la forme d'une sorte de méduse. Un développement pour le moins inattendu qui lui fit écarquiller les yeux d'incrédulité. Ce type était sûrement une des espèces bizarres dont il avait entendu parler, censées pulluler parmi la myriade de réguliers qui montaient les étages. Pas la plus majestueuse au demeurant. La curiosité du jeune Ha, déjà titillée auparavant, entrait maintenant en ébullition.

Le Yeon auto-proclamé, visiblement moins curieux de la faune et la flore, fait sur-le-champ la preuve de son statut sans se départir de son calme. Mettre le feu à leurs membres n'était pas tout à fait ce à quoi Shijin s'était attendu de la part des Yeon, mais force était de constater que son imagination avait vite atteint ses limites. La bestiole accueille cette démonstration d'un cri de douleur, avant de s'éloigner piteusement. Le Ha se précipite en un éclair auprès de l'étrange créature, s'accroupissant pour l'examiner dans les fourrés.

Il fait signe de s'arrêter au pyromane, la paume de sa main recouverte de bagues et bracelets dorés tournée vers lui : "Attends, stop, tu l'as eu ! Vu la tête du truc ça doit être une espèce en voie d'extinction ou quelque chose comme ça. Il faudrait le relâcher dans son milieu naturel, tu saurais pas où les médusoïdes vivent par hasard ?"

Crachant dans sa main avant de tenter d'éteindre les flammèches qui persistent autour du slime, le Ha ahuri se veut rassurant : "Accroche-toi ! T'as une espèce à sauver ! Tu vas t'en sortir, tu vas t'en taper des méduses, j'te le promets !!"